17 juilet 1947

Mon cher Pikolo,
Je t'écris pour prendre de tes nouvelles, et surtout pour savoir si tu as survécu. Je n’ai pas été évacué avec vous puisque j’avais la scarlatine. Nous sommes restés 10 jours dans notre chambre du KB avant que les Russes n’arrivent. Ah si tu savais quel soulagement cela me fait d’être à nouveau libre… J’espère sincèrement que tu as survécu pour vivre ça.
Si tu savais… J’ai même rencontré quelqu'un. Elle s’appelle Lucia. Elle est très belle, intelligente… J’aimerais que tu puisses la voir.Et dire que je n’aurais jamais cru que quelqu’un aurait à nouveau l’occasion de m’aimer! Et pourtant…
J’ai beaucoup repensé à la fois où nous étions partis ensembles chercher de la soupe pour le repas. Tu te souviens du chant d’Ulysse ?


                                                                    « Considerate la vostra semenza
                                                                     fatti non foste a viver come bruti,
                                                                  ma per seguir virtute e canoscenza »


Ce jour-là, j’ai compris. J’ai compris pourquoi nous nous battions, pourquoi nous avions survécu jusqu’alors, c’est pour des moments comme celui-là, des moments d’échange et de partage.
Si un jour tu lis cette lettre, fait moi la promesse je t’en prie, d’apprendre l’italien. Cela me ferait énormément plaisir, c’est très important pour moi.

 

                                                          Primo